Réviser les temps de l’indicatif en programmant un robot conversationnel : un apprentissage actif et réflexif

Dans le cadre des TraAM 2024-2025, dont la thématique était cette année pour les lettres : « Travailler la langue avec le numérique : quels scenarios ? quels outils ? quels enjeux ? Les exerciseurs en étude de la langue » je me suis intéressée avec mes collègues à l’utilisation de robots conversationnels.

Pour cette séance, c’est l’application Mizou qui a été utilisée. Elle est simple à prendre en main et propose une version gratuite qui permet de facilement se familiariser avec la programmation d’un robot conversationnel.

Après avoir programmé puis proposé à mes élèves plusieurs robots conversationnels portant sur des points de langue, je me suis vite heurtée aux limites de cet outil, l’Intelligence Artificielle ne comprend pas la langue, elle applique une probabilité linguistique.

L’intérêt et l’engouement de mes élèves pour ce type d’outils m’ont poussée à approfondir l’activité, en les invitant à adopter une posture réflexive : analyser, questionner, et corriger les productions de la machine.

Cette séance présente donc une prise en main de l’outil Mizou par les élèves, fortement accompagnée par le professeur, puis une phase de test autonome du chatbot conçu en classe.

mailEnseignant :

Margaux Fusier – margaux.fusier@ac-besancon.fr

   contacts

Contexte, durée et classe :

J’ai proposé cette activité à mes élèves dans le cadre d’un travail sur les temps de l’indicatif. Nous avions déjà vu ensemble la formation de ces temps, à travers plusieurs rappels et exercices de pratique. L’idée ici était de réinvestir ces connaissances autrement, en créant un chatbot capable de les interroger sur ce point de langue.

Cette activité peut tout à fait être adaptée à d’autres notions, tant que le sujet est suffisamment précis pour que le chatbot le « reconnaisse » et propose des réponses pertinentes.

Cette activité permet notamment de préparer une évaluation sur la notion choisie.

Elle a été menée auprès de classes de 4èmes sur une séance de 55 minutes.

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Objectifs :

  • avoir un regard réflexif sur ses apprentissages
  • se former au fonctionnement de l’intelligence artificielle
  • concevoir un outil de révisions

Conditions matérielles :

  • un vidéo-projecteur
  • des tablettes Ipad disposant d’une connexion internet
  • expérimentation menée avec la version gratuite de Mizou
  • Précautions d’utilisation spécifiques aux IA génératives :
    • Connexion et équipements de l’établissement.
    • Chatbots configurés par / avec l’enseignant.
    • Inscription de Mizou au registre RGPD en précisant la nature des activités proposées aux élèves.
    • Utilisation de pseudos par les élèves pour le suivi des activités.

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Mise en œuvre :

À l’issue d’un travail sur les temps de l’indicatif et en vue d’une évaluation sommative, j’ai proposé à mes élèves de programmer un chatbot de révisions sur la plateforme Mizou.

Ils avaient déjà dialogué avec un robot conversationnel à l’occasion d’un autre travail (révisions de notions de vocabulaire) et avaient apprécié l’activité. L’objectif en les faisant participer à la programmation du chatbot était de les faire réfléchir aux enjeux et finalités de l’évaluation et par conséquent aux méthodes de travail et de révisions à mettre en oeuvre pour s’y préparer.

Je trouvais également important de leur montrer comment fonctionne ce type d’outil, et surtout à quel point son utilisation demande de la réflexion, notamment sur la manière de formuler les consignes dans le prompt. C’était une façon de leur faire prendre conscience que les outils numériques ne fonctionnent pas « tout seuls », et qu’ils nécessitent un vrai travail sur le langage.

  1. Présentation de l’interface 

La séance a débuté par la présentation de l’interface Mizou, pour cela j’ai projeté ma session au tableau.

Les élèves disposaient de leur leçon sur les temps de l’indicatif et d’un document de brouillon.

Après avoir donné un titre très clair au robot : Les temps de l’indicatif, nous nous sommes penchés sur la zone de saisie « Instructions pour l’IA ». J’ai expliqué aux élèves que cette case correspondait à ce qu’on appelle un prompt : c’est une consigne détaillée qui permet d’orienter le comportement de l’intelligence artificielle. Il s’agit d’y définir précisément le rôle que l’IA doit jouer, les objectifs de la séance et les méthodes de travail attendues . Plus cette instruction est claire et complète, plus les interactions avec le robot sont pertinentes.

2. Écriture collective du prompt

Nous avons alors construit ensemble une première version du prompt, en nous appuyant sur les questions suivantes :

  • Qui est le robot ? Un professeur de français.
  • À qui parle-t-il ? À un élève de collège.
  • Que doit-il faire ? Aider à réviser les temps de l’indicatif.
  • Comment doit-il s’y prendre ? Poser des questions et corriger les erreurs.

Ce travail collectif a permis aux élèves de comprendre que derrière un chatbot apparemment « intelligent », se cache en réalité une consigne humaine très précise.

Ce travail n’a pas été immédiat : au départ, les élèves ont simplement proposé que le robot « pose des questions », sans préciser de quel type de questions il s’agissait.

L’écriture du prompt a révélé une difficulté : beaucoup d’élèves ne savent pas comment on révise efficacement.  Ils ont peu d’expérience de la métacognition, c’est-à-dire de la réflexion sur comment on apprend. Le travail d’écriture du prompt est alors devenu un prétexte à une réflexion sur ces stratégies : quels types de questions sont utiles ? À quel moment faut-il corriger, expliquer ? Cette phase a permis de lier compétences numériques et méthodologiques.

L’interface permet de tester immédiatement les réglages proposés, ce qui facilite la détection rapide des problèmes et des oublis. Pendant 20 minutes, nous avons travaillé en classe entière à compléter et affiner le prompt, tout en effectuant des tests réguliers. Ce va-et-vient a aidé les élèves à mieux comprendre l’impact de leurs choix sur le comportement du chatbot.

3. Mise en pratique : les élèves entrent en conversation avec le robot. 

Ensuite les élèves ont pris une tablette pour deux, j’ai lancé une session d’étude et ils se sont connectés au Chatbot grâce au QR code généré par Mizou.

Durant cette phase de travail, les élèves pratiquaient à la fois des révisions sur les temps de l’indicatif mais portaient aussi un regard critique sur leurs échanges avec le Chatbot.

Pour chaque « défaut » remarqué, ils essayaient de formuler une nouvelle règle à ajouter au prompt qui permettrait de corriger le problème constaté.

Ce temps de test par binôme a duré une vingtaine de minutes. Les élèves ont pu ainsi répondre à une dizaine de questions sur les temps de l’indicatif tout en expérimentant les limites du robot conversationnel comme on peut le voir dans les extraits suivants :

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Résultats :

Comme ils avaient participé à la programmation du chatbot, les élèves prenaient ses erreurs un peu comme les leurs. Cela les rendait plus investis. Ils voulaient comprendre d’où venaient les hallucinations et comment les corriger.

Le fait de pouvoir « tester » l’IA les amusait beaucoup. Certains se sont même pris au jeu d’écrire des réponses volontairement fausses pour voir comment elle réagirait. Si cet aspect les a clairement motivés, il a aussi un peu détourné l’attention de certains, qui se sont moins concentrés sur la pertinence des questions liées aux temps de l’indicatif.

Lors de cette séance, les élèves ont finalement trouvé que les exercices proposés n’étaient pas assez variés et difficiles en comparaison avec le travail qui avait été mené les semaines précédentes en classe.

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Bilan :

Points positifs :

J’ai remarqué que les élèves étaient vraiment curieux et impliqués avec cet outil numérique. Ils ne se contentaient pas de réviser passivement, mais jouaient un rôle actif en testant le chatbot, en analysant ses réponses, et en réfléchissant à comment améliorer ses consignes.

Le travail sur la création du robot conversationnel a surtout permis d’aborder un point important : un travail sur la métacognition qui n’est pas toujours simple à mettre en place en classe. En construisant des règles, en repérant les erreurs et en ajustant le prompt, les élèves ont pris conscience des stratégies nécessaires pour mieux maîtriser les temps de l’indicatif.

Enfin, cette activité a été une bonne occasion pour faire un peu d’éducation aux médias, en particulier sur l’intelligence artificielle. Les élèves ont pu mieux comprendre les limites et les possibilités de ces outils.

Points négatifs :

Pour respecter la réglementation RGPD, cet outil ne peut pas être utilisé par les élèves à la maison, ce qui restreint son usage.

J’ai aussi remarqué que, même si les élèves aiment échanger avec le chatbot, leurs réponses restent souvent très courtes. Ils n’aiment pas vraiment rédiger, et même dans ce cadre plus ludique, ils vont à l’essentiel. Les échanges sont donc parfois assez succincts, ce qui limite un peu la richesse du dialogue qu’on pourrait attendre avec un tel outil.

Plusieurs élèves n’ont pas pu échanger de manière fluide avec le chatbot à cause de problèmes de connexion.

Activité indexée sur Edubase :

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